La naissance d’un enfant est un grand bouleversement dans la vie d’une femme, d’un couple, d’une famille. Un bonheur attendu par tous, parfois depuis longtemps où chacun va voir son rôle évoluer, son environnement changer. Mais on ne s’imagine pas le tsunami émotionnel que ces parents vivent quand, pendant la grossesse on leur annonce que leur bébé est porteur d’un handicap, qu’il naît prématurément ou pire que leur enfant décède. C’est comme un gouffre qui s’ouvre sous leurs pieds qui stoppe net cet avenir projeté avec un enfant parfait. Alors, comment annoncer le décès à la fratrie ? Que dire ? Comment va-t-elle réagir ? Comment accompagner au mieux la fratrie ?

Autant de questions que les parents se posent lorsqu’ils vivent un deuil périnatal. Chaque enfant est différent, cependant nous pouvons retrouver des réactions communes en fonction de leur âge. Il s’agira de les accompagner au mieux selon leurs spécificités.

Le deuil périnatal c’est quoi ?

Selon la définition de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le deuil périnatal survient lorsque des parents perdent leur bébé entre 22 semaines d’aménorrhée et le 7e jour après sa naissance.

Pour moi, il n’y a pas de limite. Ce n’est pas parce que le bébé n’a pas atteint 22 SA qu’il ne représente pas une immense perte pour ses parents. A partir du moment où la grossesse est investie par les parents, la perte du bébé est un deuil à faire pour tous les membres de la famille.

Comment annoncer le décès du petit frère ou de la petite sœur?

Le plus simplement possible, j’ai envie de dire. Annoncer un décès est un jeu d’équilibriste dans lequel l’adulte devra savoir prendre sur lui et être bienveillant : vis à vis de l’enfant mais aussi de lui-même. Tâche complexe et parfois déroutante, le tsunami émotionnel auquel fait face le parent peut rendre l’annonce difficile. Certains parents préfèrent alors déléguer l’annonce à un proche ou un professionnel. D’autres préfèreront s’assurer de la présence d’une tierce personne qui prendra le relais si cela s’avère trop complexe pour lui.

l’enfant face au deuil périnatal

Face au deuil périnatal les réactions différent selon l’âge de l’enfant : les enfants de moins de 8 ans

Les plus petits, avant 5 ans, sont plus sensibles à la dimension inconsciente de l’explication. Ils ne comprennent pas réellement les mots mais captent l’état émotionnel de la personne qui leur annonce le deuil périnatal.

Ils peuvent faire preuve d’une indifférence qui n’est qu’apparence lorsque, rapidement, ils reprennent un jeu ou une activité sans dire un mot. Cette réaction est incompréhensible et désarmante pour l’adulte en face. Celui-ci peut penser que l’enfant n’a pas compris ce qui se passait.

A cet âge là, le cerveau est encore en grande partie immature. L’enfant s’imagine alors responsable de ce qui survient dans son environnement. Il est égocentrique. L’activité et le jeu sont un moyen pour lui de mettre à distance une réalité qui lui est insupportable. Se sentant responsable, il peut éprouver une forte culpabilité bien qu’infondée. Son imaginaire bien développé ne tardera pas à échafauder les scénarios les plus farfelus et catastrophiques qu’il puisse.

Aussi, expliquer clairement les faits, avec des mots adaptés, lui permettra d’appréhender la réalité avec moins de culpabilité. Cela n’enlèvera en rien à l’intensité des émotions ressenties.

On peut aussi observer une phase de régression à cet âge. Ce n’est que le témoignage de l’angoisse que vit l’enfant.

Entre 5 et 8 ans, l’enfant est plus facilement dans le factuel. Il peut poser des questions qui peuvent perturber l’adulte ou paraître dures. Il faut alors être prêt à les accueillir.

La notion d’irréversibilité de la mort est souvent acquise. L’enfant l’a intégré comme un processus naturel de tout être vivant bien que difficile à vivre et à accepter. Il peut poser des questions parfois très crues ou au contraire ne pas en poser du tout. Il peut cacher ses émotions et retenir ses larmes de peur de perdre le contrôle. Dans ce cas là, il est facile d’imaginer que l’enfant est dans le déni. Or, ce n’est pas le cas. On peut aisément déceler son trouble intérieur par des manifestations extérieures telles qu’une absorption intense dans des jeux ou bien des rires plus exagérés que de coutume, des passages du rire au larmes plus fréquents par exemple. Le mimétisme est important à cet âge là. Aussi, s’il voit les adultes autour de lui réprimer leurs émotions, il fera de même. Il aura tendance à taire ses ressentis.

Le sport comme moyen d’évacuer sa souffrance

Les enfants de plus de 8 ans face au deuil périnatal :

Les pré ados entre 8 et 12 ans ont généralement besoin d’une phase de digestion émotionnelle. Ils ont plus facilement tendance à s’isoler et revenir plus tard vers l’adulte avec des questions qui attendent des réponses précises.

Conscient de la charge émotionnelle qui pèse sur le parent, ils peuvent plus facilement taire leurs émotions afin de ne pas surcharger l’adulte. Dans ce cas là, l’enfant a le sentiment que s’il exprime ses ressentis, il augmentera la charge émotionnelle du parent. Il craint que le parent craque psychologiquement. Il peut alors se ”parentaliser” et tenter de réconforter son parent tout en sacrifiant ses propres ressentis.

Les ados, quant à eux, oscillent entre des débordements émotionnels et un repli mutique dans leur antre qu’on leur connaît si bien. Il expriment plus facilement leur désarroi dans l’action. On peut alors remarquer des accès de colère, des conflits, des refus de se rendre dans les réunions familiales, au lycée ou même des sorties entre amis. L’adolescent est dans une ambivalence et une contradiction permanentes qu’il ne maîtrise pas non plus. Il se sent tiraillé émotionnellement. Il a un grand besoin d’échanger tout en refusant la communication.

Se retrouver face au deuil éveille chez lui de grandes questions métaphysiques qui rejoignent sa quête de sens de son existence. Il entre alors dans un nouveau champ d’expérience dont l’intensité de sa souffrance et aussi forte que les tourments qui l’agitent. L’ado touche alors des aspects essentiels de sa vie et a l’impression d’être quelqu’un à part.

Il est indispensable de garder en tête que les caractéristiques ci-dessus ne sont que des grandes lignes directrices et que chaque enfant est différent. Il s’agira alors de l’accompagner au plus proche de ses besoins.

Accompagner les émotions de l’enfant

Comment accompagner au mieux son enfant ?

La souffrance de la fratrie est tout aussi réelle et essentielle à entendre et soutenir. Les parents étant sous les feux des projecteurs, les enfants peuvent rester dans l’ombre et taire leur souffrance. Les émotions de tristesse, de culpabilité sont intenses et parfois amplifiées par le sentiment qu’ils sont moins importants aux yeux des proches que l’enfant décédé. Aux prises avec leur propre vortex émotionnel, les parents ne mesurent pas toujours la portée de leurs propos. Des phrases prononcées par les parents telles que “ma vie ne vaut plus la peine d’être vécue. Ma vie vie est finie, je veux partir avec lui/elle.” renforcent cette culpabilité du survivant et le sentiment qu’ils ne peuvent pas rivaliser.

Un sentiment d’infériorité s’installe alors. Tout comme l’adulte, l’enfant peut développer le sentiment de ne pas mériter de vivre, ni d’être heureux.

Dans tous les cas, il est important de leur donner des explications claires et précises, tout en leur laissant le temps de poser des questions et de s’exprimer.

Créer un cadre sécurisant, rassurant dont l’enfant a besoin pour se confier ne se fera pas nécessairement au sein de la famille impactée par le deuil. L’enfant peut trouver des alliés à l’extérieur de celle-ci. Il est vital que l’adulte quel qu’il soit (parent, amis, professeur, professionnel…) aide l’enfant à reprendre contact avec ses émotions, à rencontrer ce qu’il a enfoui en lui, l’accompagne dans son travail de deuil et son chemin de résilience.

D’autres pistes :

Il est important que l’enfant se sente écouté, compris et puisse s’exprimer librement, exprimer ses ressentis de quelque manière que se soit : par la parole, le dessin, le jeux, le sport …

On peut lui proposer par exemple des activités créatives, écrire un journal intime, créer un autel ou un album photo en l’honneur du bébé décédé. Discuter avec l’enfant pour comprendre ce dont il a besoin est fondamental. Des techniques telles que l’hypnose, la PNL peuvent l’aider à apaiser l’intensité des émotions qu’il traverse et lui fournir un cadre sécurisé, sans jugement dans lequel il pourra s’exprimer.

Il est essentiel de rappeler que chaque enfant est unique et que leur réaction dépendra de leur personnalité, de leur vécu et de leur relation avec le bébé décédé.

D’autre part, ne pas hésiter à faire appel à un professionnel pour accompagner le deuil. On sait que celui-ci impacte toute la famille, et qu’il est parfois trop difficile d’avoir les ressources nécessaires lorsque l’on traverse soi-même une tempête émotionnelle.

Prenez soin de vous…